Peut-on écraser ce comprimé ?
La Société française de pharmacie clinique (SFPC) met à jour chaque année sa liste nationale des médicaments per os concernant l’écrasement des comprimés et l’ouverture des gélules.
La dernière version du document a été établie en novembre 2015 par le groupe de travail Gérontologie de la SFPC, en collaboration avec l’OMéDIT Haute Normandie. Ce travail s’appuie sur les RCP (résumés des caractéristiques du produit) et les notices des médicaments.
L’approche est distincte selon la forme galénique. Les comprimés à libération modifiée (libération prolongée, gastrorésistants) ne peuvent pas être broyés. De même les capsules molles ne peuvent être ni écrasées ni coupées. En raison de leur toxicité, il ne faut pas écraser les comprimés ni ouvrir les gélules cytotoxiques.
Mais les recommandations dépendent bien-sûr également des principes actifs. A titre d’exemple, le spironolactone possède un goût très désagréable. Il est donc indiqué de l’administrer en suspension dans un liquide tel un sirop. Quant à la clomipramine, elle est sensible à la lumière et doit être administrée immédiatement. Et l’indométacine doit être prise au milieu du repas.
Concernant les bonnes pratiques d’administration, il est ainsi indiqué que le matériel doit être nettoyé après écrasement entre chaque utilisation. Un masque et des gants sont requis dans la mesure du possible. De plus, l’administration après ouverture des gélules ou broyage des comprimés doit toujours se faire immédiatement pour éviter l’altération du principe actif. Les comprimés doivent être écrasés le plus finement possible. Il faut en outre éviter de mélanger les médicaments entre eux du fait d’une possible interaction. Les médicaments sont administrés l’un après l’autre. Important : il faut éviter d’utiliser un récipient intermédiaire entre l’écrasement et la transfert dans la substance-véhicule. Sinon, en utiliser un sans relief, comportant le nom du patient et du médicament.
Sécabilité des comprimés : l’atout devenu handicap
La sécabilité d’un comprimé a pour but d’adapter les doses à administrer mais elle peut en pratique poser problème. Aussi, dans son nouveau rapport pour améliorer l’observance publié le 9 février 2016, l’Académie nationale de pharmacie préconise notamment que l’industrie pharmaceutique propose des dosages plus adaptés aux personnes âgées, en particulier dans le cas des anticoagulants et des benzodiazépines. Ceci afin de limiter, pour ce type de médicament, les difficultés liées à la sécabilité. Celle-ci se traduit, selon l’Académie, par la « capacité de fractionner à la main, sans accessoire particulier, un comprimé en deux, quatre ou n parties équivalentes grâce aux barres de sécabilité imprimées sur les poinçons de la comprimeuse ». En premier lieu, relève l’institution, le médecin rédige le plus souvent son ordonnance sans connaître la différence entre une vraie barre de sécabilité et une simple barre de fractionnement. Et sans savoir qu’il peut exister des différences de sécabilité entre un princeps et ses génériques, voire entre différentes marques de génériques pour un même principe actif…
Evidemment, à son domicile, la personne âgée éprouve des difficultés pour couper en deux ou même en quatre un comprimé, si elle n’est pas aidée par une personne de son entourage ou une infirmière. Sans compter que certains types de comprimés s’effritent lors de la coupe. Et que, par ailleurs, plusieurs médicaments peuvent nécessiter ce geste et se mélanger, posant problème lors de la prise suivante.
En outre, l’Académie de pharmacie souligne que l’indication de la sécabilité n’apparaît pas sur tous les conditionnements. Dans le cas d’un médicament avec une AMM française, cette indication est mentionnée dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP) et dans la monographie du dictionnaire Vidal (qui ne comprend pas les médicaments génériques sous son format papier…). Le terme « sécable » est accolé au nom du médicament et apparaît sur la boîte. Dans le cas d’une AMM européenne, le terme « sécable » n’a pas été retenu pour décrire une forme pharmaceutique. Ce qui rend difficile pour les officinaux la vérification de la sécabilité des comprimés et la conformité de la prescription à cet égard. Dans ce contexte, l’Académie recommande aux industriels de faire apparaître systématiquement le terme « sécable » sur les conditionnements vendus en France.