
Fin de vie, prévention, soins spécifiques : ce qui se passe dans les EHPAD
L’enquête Bientraitance 2015, menée par l’Anesm (Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médicosociaux), a livré ses premiers résultats le 18 février 2016, avant une parution exhaustive en mars prochain.
Il en ressort notamment que les trois quarts des EHPAD disposent d’unités permettant d’accueillir des personnes à besoins spécifiques. Ainsi, un établissement sur deux dispose d’une unité pour personnes atteintes d’une maladie d’Alzheimer ou apparentée, mais seulement 3 % comprennent une unité spécifique aux personnes handicapées vieillissantes.
Cette enquête souligne également que les EHPAD indiquent mettre en place, plus de 9 fois sur 10, des actions de prévention concernant les troubles cognitifs et de l’humeur, les risques de chute et de dénutrition.
Concernant la fin de vie, les EHPAD s’appuient surtout sur un personnel interne formé aux soins palliatifs. Mais par ailleurs 82 % des EHPAD font appel à des équipes mobiles de soins palliatifs, 68 % à des réseaux de soins palliatifs ou de santé pluridisciplinaires et 50 % à une équipe mobile de gériatrie.
Autres données notables, les établissements déclarent en moyenne 28 % de résidents ayant rédigé leurs directives anticipées, 93 % de résidents pesés tous les mois, 43 % de résidents ayant chuté depuis leur arrivé et 2 % de résidents ayant développé une escarre au sein de l’établissement. Par ailleurs, les deux tiers des résidents hospitalisés l’ont été en état d’urgence.
Depuis 2010, l’enquête montre une « nette amélioration des pratiques de recueil du consentement et des attentes dans les premiers moments de l’accueil ».
L’enquête Bientraitance a réuni 2015 un échantillon de 4200 EHPAD, dont les trois quarts ont répondu au questionnaire. Elle avait déjà été conduite dès 2008 et renouvelée en 2010.

Sécabilité des comprimés : l’atout devenu handicap
La sécabilité d’un comprimé a pour but d’adapter les doses à administrer mais elle peut en pratique poser problème. Aussi, dans son nouveau rapport pour améliorer l’observance publié le 9 février 2016, l’Académie nationale de pharmacie préconise notamment que l’industrie pharmaceutique propose des dosages plus adaptés aux personnes âgées, en particulier dans le cas des anticoagulants et des benzodiazépines. Ceci afin de limiter, pour ce type de médicament, les difficultés liées à la sécabilité. Celle-ci se traduit, selon l’Académie, par la « capacité de fractionner à la main, sans accessoire particulier, un comprimé en deux, quatre ou n parties équivalentes grâce aux barres de sécabilité imprimées sur les poinçons de la comprimeuse ». En premier lieu, relève l’institution, le médecin rédige le plus souvent son ordonnance sans connaître la différence entre une vraie barre de sécabilité et une simple barre de fractionnement. Et sans savoir qu’il peut exister des différences de sécabilité entre un princeps et ses génériques, voire entre différentes marques de génériques pour un même principe actif…
Evidemment, à son domicile, la personne âgée éprouve des difficultés pour couper en deux ou même en quatre un comprimé, si elle n’est pas aidée par une personne de son entourage ou une infirmière. Sans compter que certains types de comprimés s’effritent lors de la coupe. Et que, par ailleurs, plusieurs médicaments peuvent nécessiter ce geste et se mélanger, posant problème lors de la prise suivante.
En outre, l’Académie de pharmacie souligne que l’indication de la sécabilité n’apparaît pas sur tous les conditionnements. Dans le cas d’un médicament avec une AMM française, cette indication est mentionnée dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP) et dans la monographie du dictionnaire Vidal (qui ne comprend pas les médicaments génériques sous son format papier…). Le terme « sécable » est accolé au nom du médicament et apparaît sur la boîte. Dans le cas d’une AMM européenne, le terme « sécable » n’a pas été retenu pour décrire une forme pharmaceutique. Ce qui rend difficile pour les officinaux la vérification de la sécabilité des comprimés et la conformité de la prescription à cet égard. Dans ce contexte, l’Académie recommande aux industriels de faire apparaître systématiquement le terme « sécable » sur les conditionnements vendus en France.

Portrait-robot du patient goutteux
Touchant près de 1 % de la population, la goutte n’est pas seulement une maladie articulaire. Le patient hyperuricémique avec dépôts d’urate présente par ailleurs des comorbidités importantes, confirme l’étude observationnelle Adagio menée par le laboratoire Menarini auprès de 630 médecins généralistes et 1441 patients sous traitement de fond de la goutte depuis au moins 3 mois. Cette étude a été présentée lors d’une conférence de presse le 9 février 2016.
Le patient type est un homme âgé de 64 ans (+/-11,4 ans). Il est en surcharge pondérale (85 %), hypertendu (70 %) et dyslipidémique (62 %) Ce patient type peut présenter un diabète de type 2 (23,5 %), être fumeur (22 %) et insuffisant rénal (10,5 %). Dans 17 % des cas, il peut souffrir conjointement d’une HTA, d’un diabète de type 2 et d’une dyslipidémie. Au final, près d’un patient sur deux (43,6 %) souffre d’au moins une comorbidité selon Charlson.
Il est à noter que ce patient type prend 4,9 comprimés par jour (+/-3,5).
Dans 15,5 % des cas, il peut présenter plus de deux crises articulaires chaque année. Et fait préoccupant, dans 58 % des cas ce patient présente une uricémie supérieure à 60 mg/L, soit au-dessus de l’objectif thérapeutique. L’uricémie ne fait d’ailleurs pas l’objet d’un contrôle dans 19 % des cas.
Le mésusage et l’inobservance seraient en cause dans ce mauvais résultat, même si 80 % des patients suivis affirment se conformer à leur prescription. Les principaux facteurs d’observance dans le cas des patients hyperuricémiques avec dépôts d’urate sont : être âgé de plus de 70 ans, contrôler régulièrement son uricémie, comprendre et bien tolérer son traitement antigoutte, prendre un faible nombre de comprimés chaque jour.

Entre médecins et pharmaciens, comment mieux communiquer
Médecins et pharmaciens ont évoqué les difficultés de communication qui perdurent entre les deux professions lors du débat « Comment agir pour limiter les risques iatrogéniques chez les personnes âgées polymédiquées ? » organisé le 7 février 2016 lors des 9e Rencontres de l’officine.
L’ordonnance elle-même pourrait être davantage le support de cette communication.
« Pourquoi le médecin n’y indiquerait-il pas l’âge du patient, sa pathologie, la clairance à la créatinine, le débit de filtration glomérulaire ? », propose le Pr Gilbert Deray, néphrologue à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris. D’un coup d’œil, les équipes officinales disposeraient ainsi d’informations supplémentaires leur permettant de sécuriser la dispensation. Il est aujourd’hui possible pour les professionnels de santé de consulter gratuitement le site GPR, répertoriant les recommandations d’adaptation posologique par médicament.
Le médecin généraliste Marc Clerc, exerçant à Versailles, abonde dans le sens de son confrère, mais nuance : « Pour orienter le pharmacien, nous pourrions indiquer la pathologie, mais pas le diagnostic. » La transmission d’informations pourrait être codifiée, suggère-t-il. Elle pourrait prendre la forme d’outils connectés, estime par ailleurs Gilbert Deray.
« Dans ce monde où chacun est tout le temps connecté, nous sommes très isolés », considère le néphrologue, estimant qu’ « il n’est pas logique que les pharmaciens ne puissent pas poser une question et avoir la réponse dans le quart d’heure qui suit ».
Bien souvent, les officinaux disposent du numéro de portable et de l’adresse mail des médecins environnants. Le mail semble plus adapté en cas de demande moins urgente au praticien, mais soulève des questions de confidentialité. Une messagerie sécurisée et partagée entre professionnels de santé (avec notamment une fonctionnalité de dématérialisation des ordonnances) constitue un outil de communication idéal, mais encore peu développé.
Les praticiens présents au débat déplorent le retard pris dans le déploiement du dossier médical partagé (DMP), à l’heure où les solutions numériques trouvent rapidement leur mise en œuvre. Ils souhaiteraient pouvoir accéder au dossier pharmaceutique (DP).
« Lors de la consultation, les patients ne nous informent pas forcément des médicaments qu’ils prennent par ailleurs », témoigne Marc Clerc.