Comment le médecin peut-il rendre optimale son ordonnance pour un patient âgé ? Le Pr Muriel Rainfray, gériatre à Bordeaux, a évoqué les éléments qui fondent cette démarche vertueuse lors du Congrès national des pharmaciens, qui se tenait à Strasbourg les 20 et 21 octobre. Tout d’abord, du point de vue de la gériatre, le médecin ne doit pas prescrire sans avoir établi un diagnostic précis. « Parfois, il y a des signes et des symptômes qui sont présents sans que l’on sache identifier la pathologie qui est derrière. »
Ensuite, évidemment, il faut donner priorité aux médicaments qui présentent le moins d’effets indésirables et de risques d’interactions. Se souvenir que les traitements les plus pourvoyeurs d’effets secondaires sont les médicaments cardiovasculaires (diurétiques, antiarythmiques, antagonistes calciques, IEC, bêtabloquants, vasodilatateurs, anticoagulants…), devant les psychotropes et les traitements neurologiques (antiparkinsoniens et antiépileptiques). « Attention également aux médicaments qui ont des propriétés similaires et à ceux qui ont été récemment mis sur le marché : ils présentent peu d’essais cliniques chez le patient âgé fragile. » Les médicaments dont le service médical rendu (SMR) n’est pas optimal ne sont pas prescrits en priorité. Dans tous les cas, il faut s’enquérir du rapport bénéfice/risque d’un traitement, tenir compte des co-morbidités, de l’espérance de vie et des conditions de vie du patient.
La prescription doit être précise, claire et compréhensible. « Regroupez les médicaments par classe thérapeutique », recommande par exemple aux médecins le Pr Rainfray. Ceci facilitera la dispensation en pharmacie, l’administration par les infirmier.ière.s, ainsi qu’une meilleure compréhension des traitements par les patients. Les médecins doivent s’interroger sur l’utilité de tout traiter : peut-être doivent-ils faire des choix et établir une hiérarchisation des pathologies.
Pas de prescription sans adaptation de posologie en cas d’insuffisance rénale chronique, prescription à faible dose et progressive sont les règles de base de l’ordonnance en gériatrie.
« La prise doit être la plus simple possible, dans l’idéal une fois par jour. » Le choix du prescripteur se porte de préférence sur les molécules à demi-vie courte et les galéniques les mieux adaptées à la situation du patient. Il est important de prévoir la durée du traitement, et notamment les modalités d’arrêt lorsqu’il y a nécessité d’un sevrage.
Au cabinet, comme à l’officine, il faut apprécier l’aptitude du patient à gérer son traitement : présente-t-il des troubles visuels, des troubles de la mémoire, un déficit d’autonomie fonctionnelle ?
Pour éviter le cumul d’ordonnances, le médecin généraliste reste le coordonnateur de la prescription, évitant rajouts et redondances et soutenu en cela par le bilan partagé de médication réalisé à l’officine.
Le traitement, enfin, est régulièrement réévalué. Une vigilance accrue est requise dans le cas d’affections intercurrentes, qui peuvent être à l’origine de perturbations : troubles digestifs, chute, épisodes infectieux, anorexie, déshydratation
Matthieu Vandendriessche, docteur en pharmacie, conseil en gérontologie